Editions Ring, Français, Polar/thriller français

Les démoniaques – Mattias Köping

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C’est sur les conseils de nombreux lecteurs que je me suis lancée dans la lecture du premier livre de Mattias Köping, les Démoniaques.

Préparez votre liste de livres à acheter, parce que celui-ci est à ajouter tout en haut de la pile !

L’histoire

C’est dans le fin fond de la campagne française Les démoniaques est enraciné. Nous suivons la vie de Jacky, dit « l’Ours », une espèce de brute, magna de la drogue et proxénète notoire. D’apparence tranquille, une petite communauté des notables et gens respectables de la ville va se retrouver au cœur de la plus grosse affaire de mœurs du secteur. Tous vont être éclaboussés par la vengeance de Kim, la fille de l’Ours, utilisée comme dealeuse et servant accessoirement régulièrement d’objet aux hommes friands de chair fraîche, et à son père lui-même. Les cadavres s’amoncèlent, les révélations fracassantes auront pour but de jeter une bombe dans ce petit monde aux rouages bien huilés. Parce que Kimy, ce qu’elle veut, ce n’est pas la justice des hommes, c’est la vengeance pure et dure, elle veut les voir souffrir comme elle, elle a souffert.

Un thriller choc, un coup de massue

On m’avait prévenue, Les Démoniaques serait une lecture éprouvante, difficile de part les sujets abordés et de part la manière dont l’auteur les traite. J’ai refermé cette nuit un livre puissant, qui m’a tenu aux trippes, qui a broyé mes émotions de lectrice. Je voulais une lecture bouleversante, qui laisserait des traces en moi, qui me marquerait l’âme et dont je me souviendrais dans plusieurs mois. Je sais, en terminant la dernière page de ce livre, que c’était ce bouquin qu’il me fallait et pas un autre.

Le livre commence de matière brutale, on est directement dans le bain, on se dit que si tout le livre est à l’image des premières pages, on ne sait pas si on tiendra et si on le terminera. Mais très rapidement, les scènes barbares, violentes, laissent place à l’histoire d’une quête, d’une vengeance. On assiste à la rébellion d’une victime, envers ses bourreaux.

Je risque de choquer certains lecteurs qui ont trouvé le livre atroce (même s’ils l’ont finalement aimé), mais je m’attendais à pire, je m’attendais à une surenchère d’images dégueulasses, là pour bouleverser le lecteur et n’apportant rien d’autres que des détails crus mis bout à bout pour choquer gratuitement. Je me suis dit que si ce livre était orienté de cette manière, je n’arriverais pas à le terminer et je devrais abandonner ma lecture. Mais j’ai découvert bien plus que ça au fil des pages. J’ai trouvé que Mattias a réussi le tour de force de ne pas tomber dans l’étalage de perversités, les scènes malsaines sont multiples, certes, cruelles, aussi, elles nous impactent parce qu’elles touchent à ce qu’il y a de plus grave, la violence sexuelle sur les femmes, et surtout la pédophilie, on est d’accord… Ce que vivent de nombreux personnages se rapproche de l’enfer, mais l’auteur suggère un certain nombre de passages violents et ne rentre pas toujours dans les détails des viols en approfondissant les descriptions des sévices. Il nous claque par-ci par-là une scène plutôt détaillée, assez courte d’ailleurs, mais les autres nombreux passages de violences sont traités de manière plus éloignée, les détails sont moins nombreux et ça nous aide à continuer notre lecture. Je pense que si toutes les scènes avaient été autant approfondies que les premières, je n’aurais pas continué le livre car j’aurais eu l’impression de tomber dans une sorte de voyeurisme morbide. Et clairement, ce n’est pas le but de ce livre. Je ne vous dis pas que c’est un livre facile à lire, je ne dis pas que les scènes ne sont pas parfois gênantes, à la limite du supportable même, mais pour avoir lu un sacré paquet de livres difficiles dans ma vie de lectrice, croyez-moi, ça aurait pu être encore pire.

Les sujets principaux abordés tournent autour de la drogue et des violences faites aux femmes et aux enfants. Les femmes sont d’ailleurs réduites à de simples objets sexuels, quel que soit leur âge, avec une préférence pour les très jeunes adolescentes, peu importe qu’elles soient de parfaites inconnues ramenées des pays de l’Est, ou qu’elles soient leurs propres filles. Tout ça importe peu pour eux, car elles ne sont que des chattes, là pour assouvir les perversions les plus profondes de ces hommes démoniaques. Peut-on d’ailleurs  appeler « hommes » ou « humains » ces déchets de la société?

Et puis, il se dégage tout doucement quelque chose de plus positif, une véritable bouffée d’oxygène dans ce récit noir et étouffant : une rencontre, entre la jeune Kimy et Henri, un professeur de français. Une rencontre par hasard et qui prouvera à la jeune femme que la gentillesse, la douceur et l’amour peuvent exister. Si je ne suis pas (du tout) friande des histoires d’amour dans mes lectures, j’ai trouvé ce lien entre eux parfaitement poignant, d’une profondeur indicible et ça m’a véritablement bouleversée.

Le style de Mattias Köning

Si certains ont pu reprocher la vulgarité de langage utilisée tout au long du livre, j’ai personnellement trouvé que ce niveau de langage correspondait parfaitement avec l’idée que nous nous sommes faits des personnages, et du milieu dans lequel ils évoluent, à savoir que ce sont des beaufs, qui habitent au fin fond de la campagne (pas d’amalgame, j’habite dans la campagne profonde depuis toujours et ne considère pas tous les campagnards comme des beaufs!), ils manquent totalement d’éducation, ils chassent de manière totalement primitive, évoluent dans les affres des vapeurs de la drogue ou de l’alcool à longueur de journée.  Un langage plus élaboré, dans la bouche de ces personnages aurait sonné faux et le livre n’aurait pas eu cet impact sur nous, lecteurs. Outre ce langage déroutant, j’ai noté dans la narration de nombreuses tournures, expressions, et mots écrits dans un langage plus soutenu, preuve que l’auteur n’a pas voulu nous écrire un livre nauséabond, mais qu’il a plutôt chercher à nous propulser au plus profond de l’action en rendant le livre le plus réaliste possible.

Le mot de la fin

Si ce thriller est dérangeant, je ne l’ai pas trouvé immoral car il est le miroir de certaines tares qui gangrènent notre société. Les « faits divers » liés à ce genre d’histoires sont régulièrement relayés par les médias, qui nous épargnent la plupart du temps les détails les plus sordides afin de ne pas choquer l’opinion publique. La pédophilie et la traite humaine liée aux réseaux de prostitution existent, et Les Démoniaques en brise les tabous pour nous servir un thriller froid et acéré.

Un énorme coup de cœur !

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